Litige
Responsabilité civile de l’État
En effet, même l’État doit répondre de ses actes, ce que vient nous rappeler la décision Richard Capuano inc. c. Québec (Procureure générale)1.
Ce cas vient souligner que le procureur général du Québec, par l’entremise de ses différents ministères, peut être tenu responsable des dommages causés à une entreprise dans le cadre de l’émission de certains permis. Dans cette décision, rendue le 6 mai 2016 par l’Honorable Marc Paradis, la compagnie Richard Capuano inc. poursuivait le procureur général du Québec pour les actes du ministère de l’Environnement.
La Procureure générale du Québec a d’ailleurs été condamnée à payer à la compagnie demanderesse la somme de 548 764,91 $, avec intérêts et frais, en raison des actions du ministère de l’Environnement.
Les faits :
Le ministère de l’Environnement avait émis un certificat d’autorisation permettant l’aménagement et l’exploitation d’un terrain de golf par la compagnie demanderesse. Dans ce cadre, la compagnie demanderesse avait requis les changements de zonage nécessaires à la Municipalité de Saint-Télesphore où le terrain de golf devait être exploité, ce qui lui fut accordé.
Après que les travaux aient débutés, le ministère de l’Environnement décida de révoquer le permis sur la base que Capuano n’aurait pas entièrement divulgué les travaux à être effectués induisant ainsi le ministère en erreur dans le cadre de l’analyse de la demande du certificat d’autorisation.
En effet, dans le cadre de l’aménagement du terrain de golf, une grande quantité de matériels de déblais devait être extraite et vendue.
Le jugement :
Or, la preuve que le juge retient est que la personne chargée de l’analyse de la demande de certificat d’autorisation a omis de vérifier un volet relié au Règlement sur les carrières et sablières et à l’article 22 de la Loi sur la qualité de l’environnement.
Cette faute est donc retenue contre le ministère de l’Environnement et le Tribunal constate non seulement que la personne chargée de l’analyse de la demande de permis a commis une erreur, mais que cette erreur n’a pas été relevée par ses supérieurs, son chef d’équipe, la directrice régionale adjointe et le directeur général qui ont tous recommandé et/ou délivré le certificat d’autorisation. Bref, la chaîne décisionnelle en entier n’a rien vu de problématique avec l’analyse de la demande.
Il faut d’ailleurs noter que le juge constate la présence d’une mention dans le rapport d’analyse de la personne chargée de la demande de permis, voulant qu’une grande quantité de déblais excédentaires serait transportée du site pour être vendue.
Le tribunal arrive donc à la conclusion que dans ces circonstances, le ministère est le seul responsable des dommages subis par Capuano. Différents chefs de dommages sont donc accordés à Capuano, qui a su démontrer le lien de causalité entre la faute du ministère et l’abandon du projet de terrain de golf.
Le tribunal a donc condamné la Procureure générale du Québec à compenser Capuano pour les frais engendrés préalablement à la révocation du certificat d’autorisation et à l’abandon de son projet.
En conclusion :
Cette décision met donc en perspective le fait que les différents ministères, par l’entremise du procureur général, peuvent être tenus aux dommages qu’ils causent dans le cadre de l’exécution de leurs fonctions et responsabilités statutaires. N’ayez donc pas peur de défendre vos droits, peu importe que vous fassiez affaire avec un particulier ou l’État !
1 2016 QCCS 2490